VEINE NOIRE
Anne-Marie Durou
Vernissage public vendredi 14 janvier de 19h à 21h
Exposition du 14 janvier au 12 février 2011
"Le monde est divisé non en différents groupes d'objets mais en différents groupes de connexions. (...) Le monde apparaît donc comme un tissu complexe d'événements, dans lesquelles des connexions de diverses sortes alternent, se chevauchent partiellement ou se combinent, déterminant de cette manière la trame de l'ensemble."
W.Heisenberg "Physique et philosophie"
Veine Noire est la troisième exposition personnelle d'Anne-Marie Durou à la galerie Tinbox. Elle rassemble une série de dessins à l'encre sur tissu, des collages et des sculptures en lycra, métal et cuir. Elle nous invite au voyage à travers un labyrinthe de formes, de volumes et de plans fantastiques.
Chaque œuvre est construite selon un principe d'espaces amovibles. Ils suivent des sentiers qui bifurquent en créant des interstices. Paysages organiques, architecturaux ou mentaux se combinent et se multiplient par scissiparité ou par translation et semblent se déployer à l'infini. Ces univers mouvants et polymorphes créent des connexions qui induisent une confusion entre réalité et fiction. " ...tout est dans tout et tout est dans chaque partie et à force de regards, on pourrait bien être emporté dans une sorte de vertige... "* Certains éléments peuvent en effet suggérer une forme existante et reconnaissable animée par une force vitale, voire animiste. Leurs associations leurs confèrent un réalisme magique, dont le sens nous échappe.
La sculpture murale Veine Noire (verticale) est l'œuvre qui donne le titre à l'exposition. Le lycra qui la recouvre est pensé comme une peau, alors que le motif rayé vert et noir agit comme un réseau de connexions. Sa forme indéfinissable, en équilibre instable, semble s'étendre hors de l'œuvre et du mur en suivant la trajectoire de deux ramifications métalliques et tentaculaires. Dans sa puissance haptique, cette œuvre en suspens nous absorbe de manière hypnotique.
Cette dynamique mouvante et troublante se retrouve dans ses dessins qui créent des volumes abstraits, matrices de sculptures possibles. L'ensemble de la série porte le nom d'une maxime latine Memento Mori : " souviens toi que tu vas mourir ". Ces vanités contemporaines soulèvent des questions aporétiques. Le travail d'Anne-Marie Durou est un paravent qui révèle cette part d'ombre au lieu de la cacher. Elle nous propose une échappée hors du monde, dans une éternité flottante.
L'œuvre Raz de terre va encore plus loin dans cette esthétique de l'angoisse**. Cette enveloppe de fourrure inanimée est d'une beauté obscure, à la présence fantomatique, étrange et inquiétante. C'est " que l'inanimé pousse trop loin sa ressemblance avec le vivant ".***
Nadia Russell
* Daniel Bost et Dominique Chambon in Anne-Marie Durou par Daniel Bost et Dominique Chambon
** CF. Benjamin Delmotte, Esthétique de l'angoisse. Le mémento mori comme thème esthétique ", Paris, Puf, " Lignes d'art ", 2001.
*** Freud, " L'inquiétante étrangeté ", in L'inquiétante étrangeté et autres textes, traduction Fernand Cambon, Paris, Gallimard, " Folio bilingue ", 2001, p.73.